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samedi 27 décembre 2014

L’ambiguïté et la paraphrase (Almuth GRÉSILLON, Catherine Fuchs)

Il y avait beaucoup de travaux autour de ces notions, des modèles linguistiques ont été consacrés à cette question d’ambiguïté. A la fin des années 70 et au début des années 80 Chomsky portait intérêt à cette notion d’ambiguïté : Dans la grammaire générative il introduit l’ambiguïté syntaxique exemple la phrase «le cuisinier sale la note» a deux indications syntagmatiques :

  1. SN (le cuisinier) + SV (sale la note) ==>  SN = det+nom; SV = v+GN(det+nom)
  2. SN(le cuisiner sale) + SV (la note)  ==> SN = det+nom+adj; SV = complément+v)

   Pour une désambiguïsation en contexte on distingue entre l’ambiguïté et le double sens selon GRÉSILLON (Modèle linguistique publié en 1988).


  • Biunivocité : dans un langage formel à chaque forme correspond un sens.
  • Non biunivocité : dans un langage naturel, à un signifiant peut correspondre à plusieurs signifiés et vice-versa et, c'est cela qui va déclencher des quiproquos, des malentendus, la polysémie, le flou, le vague.....etc. 

L’ambiguïté 

L’ambiguïté (ou ratés du langage) a toujours été rejetée par les grammairiens et les sémanticiens, mais après le développement de la théorie de l'énonciation (à partir des années 60 "Benviniste") l’ambiguïté sera réintégrée, il fera partie des langues naturelles, ce concept d’ambiguïté sera inscrit au cœur du système linguistique des langues naturelles. 

Définition de l’ambiguïté  

GRÉSILLON «J'appelle ambiguïté toute configuration linguistique dont la signification se construit par disjonction de deux termes mutuellement exclusifs.» p 30

Exemple Paul a volé pour la troisième fois
Voler dans l'exemple en dessus peut signifier à la fois "dérober, ravir" ou "se déplacer", mais pour GRÉSILLON c'est selon le contexte ou cotexte qu'un seul sens est retenu. Tout choix de l'un des deux termes se fait au détriment (à l'exclusion absolue) de l'autre : on tient compte de la dimension pragmatique.

GRÉSILLON va dégagé trois sorte d’ambiguïté :

  1. Morphologique : «Il cherche une secrétaire qui parle anglais.» dans cet exemple il y a une ambiguïté au niveau du mode : forme du présent de l'indicatif ou celle du subjonctif ! 
  2. Lexicale : «C'était un vol extraordinairement risqué.» dans cet exemple on sait pas s'il s’agit du vol (envol) ou du vol (rapt), même idée dans l'exemple «Il a bloqué la porte.» là est-ce l'énoncé veut par porte la serrure ou toute la porte ! 
  3. Syntaxique : «Le chien aboie.» là il y a un souci au niveau de la référence, on sait pas s'elle est spécifique ou générique : est-ce qu'il s'agit d'un chien particulier ou la référence est au niveau de la classe ici ! même chose pour l'exemple «quel auteur cite ce conférencier ?» qui cite qui ? ou encore «Les médecins ont soigné les malades, ils sont contents.» que reprend ils dans ce cas ? 

Disjonction absolue (GRÉSILLON)

Éjecter un sens pour garder un autre : choix obligatoire.  Pierre le Goffic dit à ce propos : «Le choix de l'un des termes implique la négation complète de l'autre.».
A côté de la disjonction absolue, il peut existé une disjonction relative : (phénomène) d’ambiguïté où le choix n'est pas obligatoire, on peut choisir ou ne pas choisir entre les deux termes (soit A soit B soit soit un mixte C). « Le non choix conduit à une sorte de mixte qui s'apparente bien plus à de l'indétermination qu'à une réelle simultanéité de la signification. ». comme dit Grésillon
Exemples : certains aliments nous rend malades :

  1. Pas tous les aliments
  2. Un certain type d'aliments
  3. Indétermination entre quantité et qualité
Face à ces deux types de disjonction caractérisant Grésillon va parlé du double sens.

Le double sens 

Toute disjonction est impossible, c'est la conjonction absolue, il y a l'intention de produire le double sens :
C'est le premier vol de l'aigle 
L'énoncé au dessus a été produit à propos de Napoléon III qui a confisqué les biens de la famille d’Orléans et c'est aussi l'énoncé qui se réfère à la prise du pouvoir.  Grésillon dit : «Ce type de conjonction, totale, simultanée, non réductible et à elle seule, que je réserve le terme de double sens. ». 
Cette conjonction est dite totale parce qu'elle s'oppose au conjonction partielle qu'on trouve dans aigre-doux, gris-noir, jupe-culotte..etc (conjonction d'une partie de A et une partie de B, mais dans le double sens on prend A et B).
Cette conjonction est dite simultanée car elle interdit toute hiérarchie entre A et B. Grésillon dit «Que l'on dit à  «la fois A et B» ou à «la fois B et A» revient strictement au même. »

Le double sens dans ce sens là s'oppose à l’ambiguïté parce qu'il ne peut en aucun cas être inscrit dans le système de la langue, autrement dit l'énoncé  "C'est le premier vol de l'aigle" n’atteint son but qu'à condition qu'on l'interprète comme un acte de double prédication :
  1. Premier rapt commis par Napoléon III
  2. Premier envol de l'aigle, roi des oiseaux et image métaphorique de Napoléon III
 cette conjonction est dite non réductible parce qu'il n'y a aucun moyen de réduire le double à l'un puisque toute disjonction est exclue. Le double sens prend plusieurs formes :

  • Les plaisanteries sur la langue
- Aveugle : A comment allez-vous ?
- Paralytique : B comme vous le voyez (je marche aussi bien que vous le voyez)

Dans ce type de plaisanteries le locuteur B introduit un double sens là où on m'avait peut être posé qu'une simple question de routine. Le double sens exprime l'intervention des sujets parlants.

  • Les mots-valises : le mot-valise s'inscrit dans le double sens et il est composé à partir de deux mots prédiqués. Un petit serviteur juif raconte sa rencontre avec Salomon Rothschild en disant : « J'étais assis à côté de lui et il me traita comme l'un des siens, de façon tout à fait famillionnaire. » 
Ce jeu de mots reçoit le double sens, on peut dire que tous les mots-valises appartiennent au double sens et ils l'exprime formellement.  La plaisanterie sur la langue joue sur la régularité de la langue, elle peut à la limite se voir attribuer un sens ordinaire, trivial, mais le mot-valise, de part sa forme irrégulière est une unité impossible dans la langue. 

Pour Grésillon l’ambiguïté s'inscrit dans le système de la langue en tant que système hétérogène. Le double sens quand à lui il est le produit du locuteur dans une situation particulière. L’ambiguïté n’existe pas en dehors de la langue, alors que le double sens ne peut exister en dehors des sujets parlants.    

On parle d'une univocité absolue quand la configuration de la langue est univoque, mais cette configuration pourrait être ambiguë ce qui nous mettra face à une disjonction relation ou une autre absolue. Tout ça c'est la langue, mais quand on parle de lalangue, c'est à dire la langue en action (discours) cela évoquera les plaisanterie sur la langue, les mots-valises ..etc et qui expriment une plurivocité absolue.

La paraphrase 

Elle consiste à reprendre le sens d'une première phrase, la paraphrase est similaire sur la plan sémantique, mais elle concerne à la fois la syntaxe et la sémantique. La paraphrase permet  aux sujets parlants de construire du «Pareil» avec le «pas pareil» comme disait Fucks.
La paraphrase consiste à reprendre la même idée d'une autre façon, mais après cette transformation ça sera impossible de rester à 100% fidèle à la première phrase. Le second énoncé sera un méta-énoncé. 
Fucks a rejeté l’idée de l'équivalence de sens, mais elle parle de d'une proximité du sens : elle va dire que les phrases dans leur relation paraphrastique sont modulantes de quelque chose, il un noyau de sens commun puis les éléments secondaires porteurs de petite différences. Pour Fucks, cette activité de paraphrase est importante, même incontournable, elle permet de réfléchir sur la langue et faire un exercice de rapprochement : exercice contraignant, vous devez rester proche du premier sens. La paraphrase peut être opposée à la phrase du départ exemple "la vue de l'éléphant" peut être traduite dans le sens de "vision" mais dans le sens de "voir". Retournons un peu a Fucks, la phrase "Ali mange la pomme" permettra de former toutes la paraphrases possibles (la pomme a été mangé par ali, c'est ali qui a mangé la pomme...etc), mais ce noyau de sens commun reste le même.

Il faut différencier la paraphrase qui est plus contrôlée du glose qui est une activité métalinguistique relevant de l'activité des sujets parlants qui reproduise de la langue à partir d'elle-même.

La paraphrase consiste en une double activité des sujets parlants (reconnaissance puis interprétation de l'énoncé). Il y a deux courants linguistiques de la paraphrase, l'un à dominance syntaxique et l'autre à dominance sémantique. Ce premier courant est marqué par l'influence des courants transformationnels (école de Paris, Chomsky...etc.), pour ce courant, l'objectif est de répertorier les différentes structures senties come ayant le même sens, ici c'est l'idée d'intuition (ressentir qu'il un lien commun entre phrases). Il s'agit de dégager les différentes constructions de phrases ressenties comme présentantes d'un sens commun exemple :

  1. Il est facile de contenter Jean
  2. Jean est facile à contenter
  3. Contenter Jean est facile
L'autre courant (sémantique) cherche à donner une vision globale sur l’activité sémantique des sujets parlants. Ce courant constiue un modèle globale portant sur une base sémantique. Pour Fuchs, Robert Martin...etc il existe un invariant sémantique sur lequel vont se greffer plusieurs modificateurs sémantique. Fuchs va rejeter de l'identité sémantique entre les paraphrases, elle dit : « La notion de paraphrase véhicule une contradiction fondamentale dans la mesure où il y a une transformation progressive d'un même (sens identique) en «l'autre» (sens différent). A redire la même chose on finit par dire autre chose au terme d'un processus continu de déformation négligeable, voire imperceptible. ».  Après avoir rejeter l'idée de synonymie totale entre unités lexicales, Fuchs rejette aussi l'idée d'identité sémantique entre les phrases, il s'agit de phrases équivalentes modulantes quelque chose et cela va distinguer trois type de paraphrases : 
  • Paraphrase linguistique : se situe sur le plan du sens linguistique, elle est étroitement liée à la dénotation. Le sens linguistique ici s'oppose à la référence, il va être définit par cette opposition à la référence. Le sens linguistique est définit comme étant l'équivalence du signifié linguistique : absence d'une biunivocité entre la réalité extralinguistique et le signifié. Deux sens peuvent correspondre à une même réalité, référence, c'est au niveau du sens et non celui de la référence que les linguistes définit la synonymie et à un niveau plus large la paraphrase. Quine dit : « Pour déterminer la synonymie de deux noms ou de deux expressions, il suffit de comprendre ces deux expressions; tandis que pour déterminer si deux noms désigne le même objet, il est en général nécessaire d'investiguer le monde. » . Pour les linguistes, il y a en principe un noyau du sens stable commun aux paraphrases et qui corresponds au sens dénotatif de la phrase; alors que les sémantismes différentiels seraient eux dans un sens non dénotatif (idée de l'invariant, du noyau, sens immédiat). Rey Dubove dit dans Le métalangage : « La prise en considération des constateurs détruit même la prise de synonymie. », autrement dit, entre les paraphrases il y a le subjectif et l'objectif, il ne faut pas le prendre sur le deuxième. Ce noyau sémantique doit faire face aux variations sémantiques exemple «Il y a action de battre, dont l'agent est Ali, le patient Ahmed. » ceci constitue l'essentiel de cette proposition, le contraignant par contre ce serait la manière de présenter cette action. Du point de vie de Ali « Ali bat Ahmed. », du point de vue de Ahmed « Ahmed est battu par Ali. »; ou bien de faire une focalisation sur l'agent « C'est Ali qui bat Ahmed. » ou encore de mettre l'action sur l'intensité de l'action «Ali flanque une de ces raclées à Ahmed.». 
  • Paraphrase référentielle : cette paraphrase se distingue de la première, elle nécessite la référence des termes utilisés pour pouvoir parler de paraphrase, il faut une référence à la situation de nomination ce qui rappellera une valeur anaphorique, déictique...etc. A ce niveau il est nécessaire d'investiguer le monde. Ce type de paraphrase exige que l'on connaisse la référence des termes désignés pour pouvoir invoquer la relation de paraphrase. L'auteure cite trois type de paraphrases : 
  1. La référence des termes anaphoriques : soit l'exemple suivant "tout le monde déteste son frère", cela véhicule deux sens, il y a deux interprétations rattachées à «son» : valeur distributive, générique c'est à dire chacun de nous déteste son frère ou une valeur spécifique, non distributive c'est à dire le frère de quelqu'un est détesté par tout le monde (il faut noter que dans le cas d'une interprétation distributive ça sera impossible une certaine transformation passive). On peut conclure qu'il est nécessaire de connaitre la référence du terme anaphorique pour établir la relation de la paraphrase. 
  2. Référence des termes déictiques : On parlera de cette relation paraphrastique entre deux phrases lorsque l'une contient un terme déictique et l'autre une expression descriptive de ce terme là exemple "ici, le climat est clément. Ici==> à Meknès le climat est doux", "il est allé le voir là bas le mois dernier".
  3. Référence description définie : se construit d'un substantif précédé d'un déterminant défini et suivi d'une qualification du X «Le X de ...», «Le X puis...». Ce type de paraphrase repredn, désigne une personne en lui assignant une qualité, une propriété au lieu de le montrer directement exemple on dit "l'auteur de la linguistique générale" au lieu de dire Benveniste ou envore "auteur des fables"...etc, ce qui permet d'éviter les répétitions. La description définie permet de paraphraser la personne, l'objet ou la personne qu'elle désigne exemple on dit "l'étoile du matin" pour la planète Venus. Nous pouvons également reprendre une description définie par une autre description définie exemple "le vainqueur d'Léna est mort" et "le vaincu de Waterloo" désignent toutes les deux la même personne, mais de deux façons différentes, voire opposées. 
Ces paraphrases sont extralinguistiques dans le sens où ils sont passées sur autres chose que le sens linguistique. 
  • Paraphrase pragmatique :  soit les exemples suivants : 
  1. Fermez la porte !
  2. Voulez-vous fermer la porte ?
  3. Il y a du courant d'air 
Si les énoncés 1 et 2 désignent tous les deux la fermeture de la porte, le troisième énoncé n'est équivalent à 1 et 2 que dans une situation de communication déterminée avec des énonciateurs précis. Le sens linguistique du troisième énoncé concerne l'idée du courant d'air, mais le sens situationnel ou pragmatique est proche de l'énoncé 1 et 2 et donc l'noncé 3 peut déclencher l'idée de la fermeture de la porte tout comme 1 et 2. L'énoncé 3 a une valeur extralinguistique, on va dire que 1,2 et 3 sont des paraphrases pragmatiques et donc ils déclenchent la même réaction chez l’interlocuteur. Pour ce type de paraphrase l’équivalence sémantique est tributaire de la situation de communication. Robert Martin dit : «La relation entre paraphrases pragmatiques est une donnée d'expérience, indépendante de la langue, mais commune à un grand nombre de personne, de telle sorte que de phrases, de sens distinct peuvent s'interpréter, grâce à une expérience d'univers commune comme des paraphrases pragmatiques. »
         

         






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