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jeudi 4 juillet 2013

Comédie en trois baisers


Arthur RIMBAUD
Recueil : "Poésies"
Elle était fort déshabillée,
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres penchaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.

Assise sur ma grande chaise,
Mi-nue, elle joignait les mains.
Sur le plancher frissonnaient d’aise
Ses petits pieds si fins, si fins.
- Je regardai, couleur de cire
Un petit rayon buissonnier
Papillonner, comme un sourire
Sur son beau sein, mouche au rosier.
- Je baisai ses fines chevilles.
Elle eut un long rire tris-mal
Qui s’égrenait en claires trilles,
Une risure de cristal…
Les petits pieds sous la chemise
Se sauvèrent : « Veux-tu finir ! »
- La première audace permise,
Le rire feignait de punir !
- Pauvrets palpitants sous ma lèvre,
Je baisai doucement ses yeux :
- Elle jeta sa tête mièvre
En arrière: « Oh c’est encor mieux !… »
Monsieur, j’ai deux mots à te dire… »
- Je lui jetai le reste au sein
Dans un baiser, qui la fit rire
D’un bon rire qui voulait bien…
- Elle était fort déshabillée
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres penchaient leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.
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